Installés dans la Drôme, sur la commune de Charpey, les 3 associés du GAEC VIGNE conduisent un troupeau de 70 vaches Holstein en système robot de traite. Spectateurs depuis plusieurs années du réchauffement climatique, avec des températures moyennes en juillet-aout de 31°C contre 27°C au national, ils se posent des questions sur l’adaptation de l’exploitation à ce phénomène.
Grâce aux génotypages régulièrement effectués et aux données du robot de traite, Guillaume CREPET, notre Technicien Race, a pu proposer une expérience inédite à Régis VIGNE, pour mesurer la relation entre les résultats génomiques et le maintien de l’ingestion des animaux, et par voie de fait, le maintien des performances laitières et de reproduction. Rencontre…
LA MODIFICATION DES PRATIQUES PAR RAPpORT AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES
Pour les associés du GAEC VIGNE, le réchauffement climatique et son impact sur le troupeau sont une évidence qui les a conduits à réfléchir à de nouvelles pratiques d’élevage et de nouveaux aménagements des bâtiments. « Pendant les périodes de fortes chaleurs, nous avons clairement observé une baisse d’ingestion et de production laitière, explique Régis VIGNE. C’est pourquoi nous avons dû adapter nos pratiques, d’abord avec la distribution de la ration le soir quand les températures sont plus basses, pour permettre aux vaches de mieux gérer leur température corporelle dans les heures suivant l’ingestion. Les résultats de reproduction ont aussi été impactés, avec un taux de fécondance plus bas. C’est pourquoi nous évitons d’inséminer les animaux sur la période du 20 juin au 20 août afin de ne pas gaspiller de doses. Une insémination est réalisée sur cette période, seulement si une vache est vraiment en retard. La stratégie a été aussi d’avancer l’âge à la première IA sur les génisses et ainsi l’âge au premier vêlage afin de ne plus les inséminer pendant cette période.
Au niveau des bâtiments, des adaptations ont également été faites comme l’installation de l’arrosage sur le toit afin de diminuer la température sous les tôles, un système qui est plutôt efficace. Ont ensuite été installés des brumisateurs ainsi que des ventilateurs pour rafraîchir et renouveler l’air dans les bâtiments. »
L’OBSERVATION DES VACHES LES PLUS RESISTANTES
Férus de génétique et très attentifs à leurs animaux, les associés du GAEC se sont rapidement aperçus que certaines vaches résistent plus que d’autres au stress thermique.
« On investit régulièrement dans des embryons qu’on fait venir de Bretagne, où le contexte climatique n’est pas le même, explique Régis VIGNE. Curieusement, les vaches issues de ces embryons semblent souffrir davantage des fortes chaleurs et perdre en production. Nous avons aussi remarqué que certaines souches avaient plus tendance à chercher les coins les plus frais dans le bâtiment, sous les ventilateurs et la brumisation, alors que d’autres pâtissent moins. Alors quand Guillaume CREPET m’a proposé cette expérience pour voir s’il y avait une corrélation entre mes observations et les résultats des génotypages, ça m’a bien sûr intéressé ! »
QUAND LA GENOMIQUE PARLE !
Pour commencer cette étude, Guillaume CREPET a d’abord sélectionné une liste de vaches qu’il a jugées, sur la base des résultats de génotypage, résistantes aux fortes chaleurs ou plutôt sujettes au stress thermique.
Régis VIGNE a ensuite été sollicité pour donner son avis d’éleveur, fruit de son observation, sur chacune des femelles. Au final, et d’après les propos de l’éleveur, les vaches ayant une bonne harmonie entre leur taille et leur largeur ainsi qu’un bon état corporel se sont révélées être les vaches les plus résistantes à la chaleur, exactement comme l’avait anticipé le Technicien Race. A contrario, les vaches déséquilibrées au niveau de la taille et de la largeur et ayant une note d’état corporel négative, semblent plus sensibles aux fortes chaleurs.
Pour confirmer cette première observation, les données d’ingestion et de production laitière des différents profils d’animaux ont été recueillies grâce au robot de traite sur une période de 3 à 4 jours durant laquelle la température n’était pas descendue en dessous de 24°C, de jour comme de nuit. L’effet sur les femelles en production s’est exprimé de façon différente.
Exemple de vache résistante |
Exemple de vache sensible |
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On peut ainsi voir que les vaches qui résistent le mieux, avec une faible baisse d’ingestion et de production laitière, sont celles qui ont une bonne harmonie taille/largeur, avec des index Hauteur Sacrum (HS) et Largeur Poitrine (LP) proches, ainsi qu’un bon Etat Corporel (EC). Les vaches présentant un déséquilibre consomment moins et produisent moins. CQFD !
LES TAUREAUX PERMETTANT UNE BONNE RESISTANCE AU STRESS THERMIQUE
Dans les années à venir, il sera donc important de travailler sur la résistance au stress thermique des vaches laitières par la génomique. Si les travaux de recherches pour le développement de la sélection sur des critères spécifiques commencent tout juste, Guillaume CREPET engage les éleveurs à commencer à travailler les accouplements de certaines vaches sur la base des résultats observés au GAEC VIGNE. « Sur la campagne passée, explique-t-il, les taureaux qui ont amené le plus de garanties par rapport au stress thermique avec un bon équilibre taille/largeur et un état corporel positif étaient Oroc, Offredo et Pacino en taureaux génomiques. En taureau confirmé, il y avait également Hospador qui donne des vaches très bien conformées et équilibrées, ainsi qu’une très bonne fertilité. Pour cette nouvelle campagne 2021-2022, les taureaux les plus performants sont Pernold, Peuplier et Pragmatic et les taureaux conseillés en système robot sont Pacoline, Rifaye RF, Ogolf RF, Omezou. »
A bon entendeur …